Notons aussi les déplacements.
Du côté de l’orateur comme de l’auditeur
il peut y avoir des migrations d’un point A à un point B mais bien souvent le visage reste tout de même apparent.
C’est peut-être encore une fois pour faire office de présence.
Certainement même.
Pourtant étant donné que nous n’avons plus accès au visage dans les rapports classiques cette omniprésence de celui-ci en visioconférence pourrait être expliquée par un manque social.
Il existe cependant, dans ces échanges numériques, des cadres momentanément désertés surtout du côté de l'auditeur mais, en général, le visage revient toujours dans la fenêtre.
Cela pourrait surprendre : nous pourrions tout-à-fait écouter sans regarder mais alors à quoi servirait d’être filmé ?
Revenons aux gestes béquilles.
Force est de constater que l’orateur aura, tout de même, une gestuelle toujours plus développée, ou en tout cas plus active, que celle des auditeurs (comme dans les rapports classiques).
Cela dit, la gestuelle passive existe.

Elle présente des similitudes et des différences entre les personnes : chacun peut avoir sa manière d’appuyer sa tête sur sa main mais tout le monde le fait.
Nous avons donc analysé ces différentes gestuelles afin de mieux comprendre ces formes de communications annexes, souvent inconscientes, qui sont pourtant omniprésentes.
Vous verrez que ces “béquilles” ne font pas que porter une parole mais donnent réellement à voir une forme de langage qui ne fait que se développer.
Le présent ouvrage recense les recherches menées sur les gestes et mimiques accompagnant la parole lors d’une interaction humaine à l’ère des rapports numériques.
Nous les appellerons gestes et mimiques “béquilles”.
Dans les rapports de communication classique, nous utilisons couramment ces “béquilles” lorsque l’on est dans une position de représentation, que l’on cherche nos mots, que l’on ponctue notre débit ou lorsque l’on tente de combler nos lacunes dans un langage qui nous est étranger.

Ces aides à la parole ont pris une toute nouvelle importance et signification avec l’apparition et l’omniprésence des échanges par écrans interposés.
Nous pouvons croire que, si dans les rapports classiques le geste béquille était perceptible même en vision périphérique grâce aux vibrations de l’air, dans les rapports visio ces gestes et mimiques vont être encore plus poussés et seront magnifiés, comme pour essayer de franchir la barrière de l’écran.
Tous ces mouvements, dans le rapport visio, sont plus ou moins bien cadrés selon la conscience de l’image de la personne, sa concentration dans le propos, son inattention, sa passivité plus ou moins active ou son rôle dans l’échange.

Nous remarquons, par exemple, que beaucoup d’orateurs finiront par oublier leur écran et regarderont ailleurs comme pour se concentrer davantage sur leur pensée que
sur l’image renvoyée.
Du côté de l’auditeur, même s’il est passif, plusieurs postures existent aussi.
Certains, en perdant le fil, ont tendance à reprendre conscience de leur image et vont recadrer leur portrait ou prendre la pose plus ou moins consciemment.
D’autres ont le visage qui fait seulement office de présence alors que d’autres encore ont la volonté d'entrer dans une écoute active et vont exprimer leur point de vue sur le propos à travers leur physionomie.

Cela laisserait-il penser qu’à l’ère du rapport visio nous ne pouvons pas à la fois contrôler notre propos et notre image ?

A priori non : il y a toujours forcément un cadre donné et si nous avons tendance à l’oublier à force de parole nous l’avons tout de même prédéfini.
Comme dans les rapports classiques, finalement, le regard sur l’autre est plus présent de l’auditeur à l’orateur que l’inverse s’il est attentif (même si l’orateur capte aussi du regard dans les rapports classiques).